Les Restos du cœur inquiets de la baisse du budget européen
Les Restos du cœur inquiets de la baisse du budget européen
Par Isabelle Rey-Lefebvre
A partir de 2021, la contribution européenne à l’aide alimentaire doit être divisée par deux.
Au cours de la campagne 2018-2019 qui s’est achevée mi-mars, Les Restos du cœur ont distribué 130 millions de repas. A l’approche des élections européennes du 26 mai et à l’occasion de l’anniversaire, jeudi, du discours fondateur de l’Union européenne, l’association alerte l’opinion sur les coupes sévères qu’envisage l’Europe dans sa contribution à l’aide alimentaire.
Le projet de budget 2021-2027, déjà adopté par la Commission européenne, prévoit en effet 2 milliards d’euros contre 3,8 milliards d’euros alloués entre 2014 et 2020 – soit 1 euro par Européen et par an –, et sur lesquels la France a perçu 500 millions d’euros. Les Restos du cœur craignent donc de voir, à l’avenir, ce montant divisé par deux.
« Même si nous disposons d’autres ressources comme la collecte des invendus auprès des supermarchés, qui nous procure des produits frais, l’aide européenne est cruciale pour la base de tous nos repas, s’inquiète Patrice Blanc, président des Restos du cœur. Une telle réduction menace un quart des repas que nous servons. »
Le Programme européen d’aide aux plus démunis (PEAD) a été créé en 1987, sous l’impulsion de Jacques Delors après que Coluche, créateur des Restos du cœur, soit venu en personne, le 20 février 1986, devant les députés européens de Strasbourg, demander « d’ouvrir les frigos de l’Europe ». A l’époque, ils contenaient bien des surplus alimentaires (viande, lait) issus de la politique agricole commune (PAC).
Le PEAD est, depuis, devenu un fonds (FEAD) et n’est plus une aide en nature mais financière qui ne dépend plus de la PAC. D’ici à 2021, la Commission européenne a proposé d’intégrer ce fonds à un financement plus large d’aide à l’insertion qui pourrait aboutir aux coupes craintes.
Aggravation de la pauvreté
En 2018, les « plus démunis » en Europe représentaient 113 millions de personnes en difficulté matérielle, dont 35 millions en situation de grande pauvreté.
« Notre cri d’alarme, poussé aussi par d’autres associations, le Secours populaire, les banques alimentaires, la Croix-Rouge, s’adresse aux futurs députés puisque c’est le Parlement nouvellement élu qui aura le dernier mot sur le budget européen, précise M. Blanc. Nous avons donc écrit, début mai, à tous les candidats têtes de liste à cette élection. »
Nathalie Loiseau, alors ministre des affaires européennes et aujourd’hui tête de liste La République en marche aux élections européennes, et Pierre Moscovici, commissaire européen aux affaires économiques et financières, présents le 27 novembre 2018 au lancement de la campagne hivernale des Restos du cœur, ont promis de prêter une attention particulière à cette question.
Autre demande des Restos du cœur : intégrer dans le socle des droits sociaux défendus par l’Union européenne, l’accès de tous à l’alimentation et, plus largement, l’instauration d’un plan antipauvreté avec l’objectif de reloger toutes les personnes à la rue.
« Il serait temps que l’Europe respecte aussi ses engagements internationaux en matière de droit des enfants car nous en accueillons de plus en plus qui vivent dans la rue, déplore M. Blanc. La moitié de nos bénéficiaires ont moins de 25 ans. »
L’association constate également une aggravation de la pauvreté en Ile-de-France, dans les grandes villes, en Alsace et dans certaines zones rurales.