Affaire Khashoggi : Erdogan affirme avoir partagé des enregistrements avec Riyad, Washington et les Européens
Affaire Khashoggi : Erdogan affirme avoir partagé des enregistrements avec Riyad, Washington et les Européens
Le Monde.fr avec AFP et Reuters
A la veille du grand rendez-vous international des cérémonies du centenaire où il est attendu, le chef de l’Etat turc a remis l’affaire à l’agenda. MM. Trump et Macron ont de leur côté demandé des éclaircissements complets à Riyad.
Le président Recep Tayyip Erdogan à Ankara, le 10 novembre 2018. / AP
L’existence d’enregistrements audio du meurtre du journaliste saoudien critique du pouvoir Jamal Khashoggi, le 2 octobre dans l’enceinte du consulat d’Arabie saoudite à Istanbul, avait été évoquée à plusieurs reprises anonymement. Comme de nombreuses révélations qui avaient filtré sur l’affaire dans la presse turque aux ordres du pouvoir mais également dans des médias américains au cours du mois d’octobre, cette information avait été prêtée à de mystérieux responsables jamais nommés. Elle est désormais officielle : le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a confirmé samedi 10 octobre qu’Ankara disposait bien d’enregistrements réalisés au sein du consulat saoudien et portant sur l’assassinat de M. Khashoggi.
« Nous avons donné les enregistrements, nous les avons donnés à l’Arabie saoudite, nous les avons donnés à Washington, aux Allemands, aux Français, aux Anglais », a déclaré le chef de l’Etat turc lors d’une conférence de presse télévisée. La présidence a ensuite précisé que les enregistrements avaient été écoutés, mais qu’aucun document écrit n’avait été partagé. « Ils ont écouté les conversations qui ont eu lieu ici, ils savent », a poursuivi M. Erdogan. Le 2 novembre, un mois après la mort du journaliste Jamal Khashoggi, le président turc avait déjà accusé dans une tribune publiée le 2 novembre dans le Washington Post les « plus hauts niveaux du gouvernement saoudien » d’avoir commandité le meurtre, sans pour autant mettre en cause le roi Salmane.
Corps découpé et dissous dans l’acide
C’est bien son fils, le tout-puissant prince hériter Mohammed Ben Salmane, surnommé MBS, qui est visé par Ankara. Après avoir d’abord fermement nié son meurtre, les autorités saoudiennes ont fini par affirmer que le journaliste avait été tué au cours d’une opération « non autorisée » par Riyad. Or plus d’un mois après sa mort, le corps de Jamal Khashoggi n’a toujours pas été retrouvé. Un conseiller de M. Erdogan, Yasin Aktay, a affirmé début novembre que la dépouille du journaliste avait été découpée en morceaux ensuite dissous dans de l’acide.
Les déclarations de M. Erdogan interviennent peu avant le grand rendez-vous international des cérémonies du centenaire de l’armistice de la guerre de 14-18 qui se tiennent à Paris, puis du Forum sur la paix qui ouvrira dimanche dans la capitale française. Elles remettent l’affaire Khashoggi sur le devant de la scène, des zones d’ombre demeurant toujours autour des circonstances du meurtre tandis que l’Arabie saoudite est de plus en plus contestée pour son engagement militaire au Yémen dans le conflit contre les rebelles houthistes et la crise humanitaire qu’il a provoquée dans le pays.
A Paris, le président français, Emmanuel Macron, et son homologue américain, Donald Trump, qui se sont entretenus en tête à tête samedi matin à l’Elysée, ont affirmé que l’Arabie saoudite devait encore fournir des « éclaircissements complets » sur l’assassinat de Jamal Khashoggi, selon une source à l’Elysée citée par l’agence Reuters. Les deux chefs d’Etat ont également affirmé être d’accord sur le fait que cette affaire ne doit pas constituer un facteur de déstabilisation supplémentaire dans la région. Ils ont par ailleurs estimé selon cette même source que l’affaire Khashoggi et ses suites diplomatiques pouvaient fournir l’occasion de poser la voie d’une résolution politique de la guerre au Yémen.
Le « meurtre sauvage » de Khashoggi était « planifié »
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