Rex Tillerson a dirigé une entreprise russo-américaine aux Bahamas
Rex Tillerson a dirigé une entreprise russo-américaine aux Bahamas
De 1998 à 2006, le probable futur secrétaire d’Etat américain a dirigé Exxon Neftegas, la filière russe d’ExxonMobil, domiciliée dans ce paradis fiscal des Caraïbes.
Rex Tillerson, PDG d’ExxonMobil, à la World Gaz Conference, à Paris, le 2 juin 2015. | ERIC PIERMONT / AFP
Nouvelle révélation des « Bahamas Leaks », la série de documents confidentiels sur ce paradis fiscal des Caraïbes : selon l’un des documents extrait par le journal britannique The Guardian, Rex Tillerson, PDG d’ExxonMobil et désigné par Donald Trump pour devenir le prochain secrétaire d’Etat américain, a dirigé Exxon Neftegas pendant huit ans.
Cette société, filière russe d’ExxonMobil, est sise aux Bahamas. S’il n’y a rien d’illégal à cela, The Guardian souligne que cette révélation est à même de soulever plusieurs questions quant à la relation qu’entretient M. Tillerson avec la Russie. Par ailleurs, le fait qu’ExxonMobil soit présent dans un paradis fiscal peut entrer en contradiction avec le slogan de M. Trump, « l’Amérique d’abord » (« America first »).
Rex Tillerson a été nommé directeur d’Exxon Neftegas en 1998, puis président la même année. Selon le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), son poste à la tête de la société des Bahamas n’avait jamais été signalé auparavant. M. Tillerson l’a occupé jusqu’à ce qu’il devienne PDG d’ExxonMobil en 2006.
67 sociétés d’Exxon aux Bahamas
Les documents extraits par The Guardian révèlent également qu’Exxon a enregistré au moins 67 sociétés aux Bahamas pour y piloter des opérations dans plusieurs pays, de la Russie au Venezuela en passant par l’Azerbaïdjan. Sa filière russo-américaine Exxon Neftegas figure dans environ 25 documents des « Bahamas Leaks ».
ExxonMobil a indiqué avoir placé certaines de ses sociétés dans ce paradis fiscal pour sa « simplicité et son caractère prévisible » et non « pour réduire ses impôts dans le pays où il intervient », indique The Guardian. Le géant américain du pétrole est l’un des plus gros contribuables de la planète, se défend-il, avec un taux d’imposition mondial de 34 % en 2015.
La proximité de Rex Tillerson avec la Russie
En bon responsable d’un géant pétrolier, M. Tillerson entretient de bonnes relations avec la Russie. Il a notamment été décoré du prestigieux « Ordre de l’amitié » des mains du président russe, Vladimir Poutine.
Il est également proche d’Igor Setchine, le patron de Rosneft, le principal producteur de pétrole russe. M. Setchine, ex-membre du KGB et proche de Vladimir Poutine, est même décrit par The Guardian comme « la deuxième personnalité la plus influente du Kremlin ».
Igor Setchine a été l’artisan, côté russe, du rapprochement entre Rosneft et ExxonMobil, concrétisé notamment par plusieurs projets dans l’Arctique russe. La décoration de M. Tillerson intervenait d’ailleurs après la conclusion d’un accord entre ExxonMobil et Rosneft pour l’exploration dans la mer de Kara. Ce projet a cependant été interrompu par les sanctions adoptées par les Etats-Unis contre la Russie après l’annexion de la Crimée en mars 2014. Des sanctions que Rex Tillerson avait réprouvées.
The Guardian souligne que l’administration Trump va très certainement abandonner cette politique dans le dossier ukrainien, ce qui permettrait à la co-entreprise russo-américaine dans la mer de Kara de reprendre, et ainsi, faire grimper le cours d’ExxonMobil et rapporter plusieurs dizaines de milliards de dollars à la major pétrolière.
Au-delà des sanctions appliquées au pétrole et au gaz russe, l’administration Obama impose des restrictions à l’entourage de Vladimir Poutine, dont Igor Setchine, qui est interdit de séjour sur le sol américain.
Les « Bahamas Leaks » en bref
Cinq mois après les « Panama papers », Le Monde et ses partenaires du consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) ont eu accès à de nouveaux documents confidentiels sur le monde opaque des paradis fiscaux : les « Bahamas Leaks ».
Ces documents obtenus par la Süddeutsche Zeitung portent sur 175 480 structures offshore enregistrées aux Bahamas entre 1959 et 2016. Ils dressent l’équivalent d’un « registre du commerce » pour ce paradis fiscal opaque, levant le voile sur l’identité des administrateurs de certaines de ces sociétés, jusque-là anonymes.