Une étude décrypte l’état d’esprit des Européens de l’ouest sur l’immigration
Une étude décrypte l’état d’esprit des Européens de l’ouest sur l’immigration
Par Sarah Calamand
Les personnes interrogées par le Pew Research Center, dont les Français, ont une vision favorable de l’impact économique de l’immigration, mais sont plus divisés sur les enjeux sécuritaires.
Pour les Européens de l’Ouest, l’immigration est bénéfique pour l’économie mais peut représenter un risque pour la sécurité intérieure. C’est l’une des conclusions d’une vaste enquête d’opinion dévoilée jeudi 12 juillet par l’institut américain Pew Research Center. L’étude a été réalisée sur un échantillon de 16 114 adultes, dans huit pays d’Europe de l’Ouest : le Danemark, la France, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, l’Espagne, la Suède et le Royaume-Uni.
Si cette recherche remonte à décembre 2017, ses enseignements permettent de mieux comprendre l’état d’esprit des citoyens d’Europe de l’ouest, à l’heure où la question migratoire suscite un vif affrontement politique entre les partis d’extrême droite, ou de droite dure, et les forces politiques traditionnelles. Les différents pays étudiés, à commencer par la France avec le Rassemblement national (ex-FN), ont tous connu, à l’exception de l’Espagne, une montée en puissance des forces populistes, de droite ou de gauche, lors des récents scrutins.
De manière générale, dans ces huit pays, les personnes interrogées considèrent en majorité que l’immigration « renforce l’économie de leur pays, grâce au travail et aux talents » des populations nouvellement arrivées. Cette vision est particulièrement appuyée au Royaume-Uni et en Suède, où 72 % des interrogés voient l’immigration comme un facteur de renforcement de l’économie. En France, cette proportion est de 54 %, tandis qu’elle est de 66 % en Allemagne, le pays qui a reçu le plus grand nombre de demandeurs d’asile ces dernières années. L’Italie aurait la population la plus divisée à ce sujet : 45 % jugent positif l’impact économique des immigrés, contre 44 % d’un avis contraire.
L’influence de l’idéologie populiste existe bien
L’enjeu sécuritaire, régulièrement mis en avant par les formations antimigrants, est beaucoup plus controversé. En Allemagne et en Italie, respectivement 51 % et 50 % des personnes interrogées considèrent que l’immigration augmente le risque d’attaques terroristes. Au contraire, dans six pays sur les huit concernés, le rapport de force est inverse, dans des proportions variables. Même les personnes interrogées de deux pays lourdement touchés depuis 2015, évitent en majorité de faire l’amalgame : 58 % des Français et 55 % des Britanniques du panel de Pew Research Center sont sur cette ligne, tout comme 61 % des Espagnols et 52 % des Hollandais.
Par ailleurs, l’étude du Pew Research Center constate que l’influence de l’idéologie populiste existe bel et bien, et peut amplifier les différences d’opinion à droite comme à gauche. De manière générale, les personnes proches des idées « populistes de droite » se démarquent nettement des sympathisants de la droite traditionnelle dans leur vision négative de l’immigration par rapport aux enjeux sécuritaires. C’est en Allemagne qu’elles sont les plus nombreuses à considérer que l’immigration augmente le risque d’attaques terroristes, avec 81 % des personnes interrogées, suivi par l’Italie (71 %).
Même phénomène à gauche, dans une moindre mesure. L’Allemagne à ce titre offre un exemple très parlant. 56 % des personnes sondées se disant proches de la « gauche populiste » considèrent l’immigration de manière négative en termes de sécurité intérieure, contre 28 % des sympathisants de la gauche traditionnelle (SPD).
Néanmoins, le clivage droite-gauche reste le plus déterminant. Ainsi, quel que soit le pays examiné, les populations de droite tendent davantage à considérer l’immigration comme un facteur aggravant du risque terroriste, par rapport à des sondés de gauche. En Italie par exemple, 53 % des personnes interrogées se disant proche de la « droite traditionnelle » lient immigration et sécurité intérieure, contre 30 % de leurs homologues de gauche. L’Allemagne reste le terrain où ce clivage est le plus marqué, avec un écart de trente points entre les personnes de droite et de gauche proches des partis traditionnels.
N’en déplaise à Emmanuel Macron, le clivage droite-gauche reste également très prégnant en France sur cette question. 4 % des personnes proches de la droite traditionnelle jugent que l’immigration augmente la probabilité d’attaques terroristes, contre 13 % à gauche.