Des campus connectés pour les jeunes des territoires ruraux
Des campus connectés pour les jeunes des territoires ruraux
Par Camille Stromboni
Douze espaces vont ouvrir à la rentrée 2019, pour favoriser la poursuite d’études dans les villes éloignées des grands centres universitaires.
La mesure démarre à petite échelle mais elle est vouée à monter en puissance. Treize « campus connectés » accueilleront des étudiants dans des villes éloignées des grandes métropoles universitaires, à la rentrée 2019. La ministre de l’enseignement supérieur, Frédérique Vidal, devait l’annoncer vendredi 3 mai, à l’occasion d’un déplacement à la Digitale académie à Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne), où une quarantaine d’étudiants suivent déjà une formation à distance, dans un espace de travail commun.
Le lieu va être labellisé « campus connecté » à cette occasion, tandis que douze autres s’y ajouteront : à Saint-Brieuc et Redon (Bretagne), Bar-le-Duc et Chaumont (Grand-Est), Nevers, Autun et Lons-le-Saunier (Bourgogne-Franche-Comté), Privas (Auvergne-Rhône-Alpes), Cahors, Le Vigan et Carcassonne (Occitanie) et Saint-Raphaël (Provence-Alpes-Côte d’Azur). L’objectif, d’ici 2022, étant d’ouvrir une centaine de structures de ce type.
Emmanuel Macron l’a annoncé lors de son discours du 25 avril, à la sortie du grand débat : sa volonté de créer des « campus connectés » s’inscrit dans l’optique « réconcilier la métropole, la ville moyenne et le rural ». Dans ces territoires ruraux, ces petites et moyennes villes, dont les difficultés ont été fortement mises en lumière par le mouvement des « gilets jaunes », l’offre d’enseignement supérieur est le plus souvent limitée. Tandis que les difficultés sont multiples, face à la mobilité géographique que nécessiterait une poursuite d’études, allant du manque de moyens financiers aux barrières psychologiques et à l’autocensure.
Les taux de poursuite après le bac y sont souvent plus faibles qu’ailleurs, souligne le ministère, citant l’exemple de l’Ardèche, ou seulement 50 % des bacheliers poursuivent des études supérieures – contre 78 % à l’échelle nationale – tandis que la quasi-totalité des lycéens du Lot sont obligés de quitter leur département pour poursuivre une formation postbac.
« Lutter contre l’exode rural »
Ces futurs campus dans des locaux mis à disposition par les collectivités territoriales (villes, départements, régions), avec un « coach » (non enseignant) pour dix étudiants, doivent permettre à ceux qui le souhaitent de suivre une formation à distance avec un « accompagnement de proximité ». Ils devraient réunir une trentaine d’étudiants par site, à la prochaine rentrée.
Un tutorat sera également exercé par les enseignants de l’université qui dispensent ces formations à distance. Une soixantaine de cursus devrait être proposée aux étudiants, principalement des licences universitaires et des BTS. Pour commencer, l’Etat apporte une enveloppe de 50 000 euros par campus, ainsi que 1 000 euros par étudiant qui viendront y suivre leur formation en ligne.
« C’est une très bonne chose d’apporter dans nos territoires cet enseignement supérieur dans de bonnes conditions », salue Vincent Chauvet, maire (MoDem) d’Autun, qui y voit une forme de déconcentration du service public. Sa ville de 14 000 habitants compte accueillir une vingtaine d’étudiants à la rentrée 2019, dans un espace dédié. Cela permettra, espère-t-il, à des bacheliers qui auraient renoncé aux études supérieures, « pour des raisons monétaires, mais aussi parce que certains ont le sentiment que la “grande ville”, ce n’est pas pour eux », de changer d’avis. Il a déjà reçu une trentaine de candidatures, alors que le projet commence tout juste à être connu. « C’est aussi une manière de lutter contre l’exode rural, de garder nos jeunes sur le territoire, ils partent étudier à Lyon ou à Dijon, et ne reviennent pas », défend-il.
Dans la communauté de l’enseignement supérieur, les réactions peuvent être néanmoins plus nuancées. « C’est une solution intéressante, mais de manière provisoire, estime un universitaire, qui ne manque pas de rappeler les taux élevés d’échec dans les formations à distance. Pour lutter contre l’autocensure et l’assignation à résidence, il faut surtout aider ces jeunes à bouger et leur donner la possibilité d’aller étudier dans de bonnes conditions à l’université. »